Extrait du livre: Mamaluna , auto édition ,Yaël Catherinet
Quand la mort toque à la porte, la femme aux cheveux argentés sait qu’elle doit se préparer à partir seule, comme le font les grands- mères éléphantes.
Elle monte le petit sentier, dernier pèlerinage qui la mène jusqu’à la colline sacrée, où elle va, une dernière fois, saluer les différents règnes : animal, végétal, minéral, lunaire, solaire, stellaire et humain. Une ultime danse salutaire de la femme qui a donné, reçu et aimé sans modération ni contrefaçon.
Elle regarde une dernière fois le soleil se lever et se coucher, les nuages passer dans le ciel, les branches des arbres s’étirer. Elle perçoit au loin les bruits du quotidien, les enfants joyeux courant les uns après les autres. Elle va, cette ancienne, elle va....
Elle monte à sa cadence et salue au passage Grand-père arbre, le gardien des collines et des plaines. En hommage à la vie, elle dé- pose sa dernière déclaration, une prière, une révérence aux pieds du vénérable. Puis elle s’assied tranquillement à ses côtés, le dos adossé à son tronc. Elle sent leurs respirations se mêler, l’alchimie, un souffle, une étincelle, un instant, le silence.
Elle laisse son corps s’accorder aux racines, à la terre, à la glaise, le limon prolifique. L’arbre et elle, en un mariage unique, entre terre et ciel, esprit et matière. Elle jette un dernier coup d’œil vers l’azur obscurci, tirant son chapeau pour le saluer, lui qui a aussi veillé sur elle, à travers les nuits et les brouillards, les orages, grelots de pluies et d’étoiles filantes.
Puis, tout doucement, elle se relève, un bâton à la main et avance de quelques pas vers la grotte de la Déesse, y pénètre, s’y repose et attend patiemment que la mort vienne et l’emporte au grand pays de l’au-delà.
Lorsque mon tour viendra, dans la nuit noire, une étoile filante pas-sera dans le ciel comme un clin d’œil adressé à ceux que j’aime. Eh oui, moi, Mamaluna, je partirai en douceur rejoindre mes sœurs...
Mamaluna
Yaël Catherinet
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